Étape 10 : Landaize – La-Balme-les-Grottes

Après une bonne nuit de sommeil, nous nous réveillons… Le cyclotouriste Grenoblois est parti, et moi j’ai une mauvaise surprise.

Crevaison lente en fin d’étape la veille, ou crevaison dans le camping ? Aucune idée. En tout cas c’est la première du voyage.

Je change la chambre. L’opération ne me prend que quelques minutes. J’avais pris deux chambres de rechange, pour ne pas perdre de temps. Je réparerai la chambre crevée en rentrant à la maison.

Par contre, c’est aussi pour moi l’occasion de constater que mon pneu avant est sérieusement endommagé. À un endroit, les fils ont craqué. Ça explique sans doute l’irrégularité que je sens à chaque tour de roue quand je roule.

Nous démarrons.

Il faut tout d’abord retraverser le Rhône par un pont routier pour repasser de l’Ain à la Savoie.

Ensuite, mon tracé passait par un bout de chemin de halage, sans trop savoir s’il était praticable, avant de retrouver la Via Rhona en site propre en repassant dans l’Ain.

Mais en arrivant, nous avons une bonne surprise : une piste cyclable. Elle semble toute neuve. Vu la couleur de l’enrobé, je pense qu’elle n’a même pas encore connu un hiver.

Un groupe de touristes Allemands roule avec nous.

« Schön! Schön! » J’entends que les Allemands trouvent l’endroit joli. Nous aussi.

On débouche ensuite sur ce chemin. On s’engage dessus.

En vérifiant a posteriori sur OpenCycleMap, on pouvait trouver une piste en enrobé en faisant un léger détour. Je n’y avais pas fait attention en traçant mon itinéraire. De toute façon, ce chemin est bien roulant. Ça convient bien aux vélos que nous avons.

Au bout, on arrive à nouveau sur de l’enrobé et on passe des petits ponts.

On quitte à nouveau la Savoie pour revenir dans l’Ain.

Mais quelques mètres plus loin, nous avons une surprise. La véloroute est barrée à quelques mètres. Les panneaux sont plus clairs que d’habitudes.

Bien sûr, on va voir quand même… et on a raison.

Certes, il y a un chantier interdit au public face à nous. Mais sur le côté, il y a une chaussée provisoire d’excellente qualité pour permettre à la véloroute de contourner le chantier. Ça passe donc très bien.

« Ils sont fous ces Français. »

La piste est ensuite un poil monotone : souvent toute droite et sous le soleil, sans ombre, sans un village… Mais c’est un plaisir de rouler sur une infrastructure d’une telle qualité. Nous roulons assez efficacement, en prenant même des relais comme le font les coureurs cyclistes.

On a poussé le zèle jusqu’à tracer des bandes cyclables là où la véloroute emprunte quelques centaines de mètres d’une route très très tranquille…

Et il y a même des flèches de rabattement aux abords des intersections ! Une vraie route en miniature.

Lyon commence à être indiquée.

A-t-on percé ce tunnel exprès pour faire passer la piste cyclable ? Impressionnant.

Ce panneau est assez amusant, car il relève vraiment d’une logique routière. Les descentes n’ont jamais été un problème pour les cyclistes. En Suisse, les cyclistes sont avertis des fortes montées. Pas des descentes.

Ceci dit, ça peut toujours servir aux rollers.

Tout à coup, la piste cyclable de luxe s’arrête. Il faut reprendre la route.

Mais pas pour longtemps. On passe un pont et on retrouve la piste, avec un aménagement de très bonne qualité pour la rejoindre.

Nous sommes doublés par un groupe de cyclistes sportifs. En deux coups de pédale, je me cale derrière eux pour profiter de l’aspiration. Ils roulent tranquillement : mon compteur indique 22 km/h. Nous les suivons facilement.

Par contre, ces passages là obligent à freiner sérieusement, et c’est plus facile de relancer pour eux que pour nous avec nos chargements.

Le paysage est de moins en moins montagneux.

Le groupe de cyclistes quitte la piste. Nous continuons.

Bientôt, nous arrivons à un endroit où mon tracé indique de quitter les bords du Rhône pour revenir sur la route. Pourtant, un tronçon de piste en site propre se trouve face à nous.

Peut-être un nouveau tronçon, comme ce matin ? Mais il comporte à son entrée un panneau « fin provisoire de l’itinéraire ».

Une voix nous appelle. C’est une dame qui nous explique que ce tronçon est un cul de sac. Il est fait, mais s’arrête brusquement au bord de l’eau un peu plus loin. La construction d’une passerelle est nécessaire pour repasser au dessus d’un autre bras du Rhône, qui constitue à nouveau la limite entre l’Ain et la Savoie…

Nous prenons donc l’itinéraire que j’avais tracé. D’abord sur un chemin tranquille, puis sur la route.

Et ce n’est pas une petite route : il y a du trafic, des camions, des tunnels…

D’ailleurs, côté Savoyard, le panneau le dit clairement :

Ça ne dure pas trop longtemps. Nous revoici sur quelque chose de plus agréable.

On n’échappe pas à une signalisation originale. Parfois pertinente…

… ou carrément absurde. Si vous cédez le passage à un engin qui débouche de ce chemin et qui vient vers vous, il passe où ? Sur vous ?

« Ils sont fous ces Français… »

On roule sous le soleil. La piste est toujours assez peu variée, mais d’excellente qualité.

Ici, la piste va tout droit, et une autre part sur la droite. Les villes et villages sont très clairement indiqués. Mais si l’on veut juste suivre la Via Rhona, on ne sait pas quelle direction suivre ! Heureusement que j’ai mon tracé. Il faut prendre à droite, direction Morestel.

Nous avons faim et nous n’avons pas vu l’ombre d’un magasin depuis ce matin. Nous apercevons une petit café-restaurant au bord de l’eau. Nous commandons une grosse barquette de frites à emporter. Avec ça et ce qu’il reste dans nos bagages, nous arrivons à un repas assez correct pour deux.

On retiendra la bonne blague du serveur, qui nous demande de mettre nos vélos dans le parking à vélos… Euh, des vélos chargés comme les notres, vous pensez vraiment qu’ils vont tenir tous seul dans vos pince-roues ? Déjà sans chargement, on sait ce que ça donne. Il se rend compte de ce qu’il a dit. Je doute toutefois qu’il ait l’idée d’acheter des vrais arceaux à vélos.

« Ils sont fous ces Français… »

Autre blague à peine plus loin : en suivant Morestel, on repasse sur la route pour passer deux ponts (parce qu’on repasse en même temps de la Savoie à l’Ain). Et quand on arrive au bout du second pont, on voit bien notre piste cyclable qui passe en dessous… mais sans voie d’accès pour la rejoindre depuis la route où nous sommes.

« Ils sont fous ces Français… »

Visiblement, les cyclistes ont résolu le problème en créant leur propre trace que nous empruntons.

Un peu plus loin, la route vient occuper le bord du Rhône, tandis que la piste la traverse et monte (légèrement) sur une ancienne route en direction d’un village.

Bienvenue à Brégnier-Cordon. Le seul village traversé par la véloroute depuis Seyssel. Et également le seul magasin depuis Seyssel.

Il y a aussi un camping municipal, et une ancienne gare reconvertie en boulangerie-patisserie. Bref, trouver ce village le long de la véloroute, c’est un peu comme trouver une oasis dans le désert.

Puisqu’on fait des courses, je fais remarquer au gérant du Vival qu’il est le premier magasin le long de la véloroute depuis Seyssel, et qu’il ferait bien d’adapter son offre aux voyageurs à vélo, par exemple en acceptant de vendre les petites briques de jus de fruit à l’unité. J’ai en effet du mal de trouver ce dont j’ai besoin, à part en quantités trop importantes. Il n’a pas l’air convaincu et prétend que les cyclistes ne s’arrêtent pas dans son magasin. Pourtant…

Pendant le peu de temps que nous passons ici, je vois quatre cyclistes s’arrêter. Sans parler de nous. C’est fou cette tendance de certains commerçants à ne pas connaître leur clientèle. Mais c’est loin d’être rare.

Nous continuons sur notre véloroute, qui traverse le village, ressort, et continue en site propre au bord de l’eau…

… et dans les petites ruelles d’un autre village.

Nous voici bientôt au Port de Groslée, un endroit où il faut se méfier des crocodiles…

… et où il ne faut pas être trop grand pour passer sous le pont.

Pont qui marque aussi la fin des aménagements cyclables. Nous voici à nouveau sur un tronçon « démerdez-vous ».

J’avais tracé sur la route, mais je préfère continuer sur le chemin de halage, non aménagé mais à peu près roulant.

Et quand le chemin de halage ne paraît plus praticable, on en trouve un autre au milieu des champs de blé et de maïs.

Ça roule plutôt bien. Il y a juste un peu de poussière…

Malheureusement le chemin débouche sur la route.

Nous restons sur celle-ci pendant un certain temps.

Mais il y a suffisamment de circulation pour qu’on en ait marre au bout d’un moment. Nous bifurquons lorsque nous trouvons une petite route plus tranquille qui repart sur la gauche. De toute façon, avec le Rhône d’un côté et la route de l’autre, on peut difficilement se perdre.

Elle rejoint le chemin de halage, qui sera goudronné à partir d’ici…

… puis à nouveau en cailloux.

Tiens, encore un panneau route barrée au milieu de nulle part. Comme d’habitude, on passe.

En fait, le chemin n’est pas barré, mais en cours de réfection. Ça donne à son revêtement un aspect bizarre et un peu moins roulant.

Nous ne sommes pas les premiers cyclistes à passer par là. C’est bon signe…

Vu comme ça, on dirait que mon vélo a fait Burning Man plutôt que la Via Rhona.

Et ce n’est pas fini.

Soudain, nous revoici sur un bout de piste cyclable en site propre.

Et lorsqu’elle s’arrête à nouveau, nous continuons sur la départementale jusqu’à Proulieu.

Nous commençons à réfléchir à un lieu pour dormir. Dans un village, mon coéquipier demande à deux hommes qui discutent dans la rue s’ils connaissent un camping.

Ils en connaissent un, mais c’est de l’autre côté du Rhône, en Isère. Il faudrait revenir sur nos pas sur quelques kilomètres pour pouvoir passer un pont et y aller.

La conversation s’engage. « D’où vous venez ? Où vous allez ? »

Le plus âgé des deux hommes nous donne un conseil :

« Méfiez-vous de l’Est de Lyon. Quand vous êtes là-bas, vous… (Il marque une pause.) Vous n’avez pas besoin d’aller au Maroc. Vous y êtes. ». Il ajoute «  Vous savez, les Suisses ne les aiment pas. C’est eux qui vont foutre le bordel à Genève. ».

C’est aussi ça le voyage à vélo. On voit les choses de près, telles qu’elles sont. Les gens, aussi.

«  Moi j’ai fait l’Algérie ! ». « Bonne soirée, monsieur. »

Nous rebroussons chemin jusqu’au pont, en discutant du racisme et de la façon dont les étrangers sont perçus et acceptés ou non dans nos deux pays. Nous avons pas mal de conversations depuis que nous roulons ensemble, sur des sujets divers allant de l’écologie à la culture de nos pays…

Comme les rois mages, nous suivons des yeux la centrale nucléaire du Bugey. Nous voici bientôt au camping de la Balme-les Grottes. L’accueil est très sympa. Le tarif est le double de la veille.

On nous donne un emplacement plutôt joli, à côté d’une petite maisonnette qui devait exister là bien avant le camping. Nous nous y installons.

La grosse contrariété du soir sera, par contre, l’absence d’eau chaude dans les douches alors qu’on en a au robinet. Après une longue étape sous le soleil et dans la poussière, devoir se laver tant bien que mal sans prendre de douche n’est pas trop appréciable…

Bilan :

Nous avons fait 103 km. Sur du quasi-plat, nos rythmes sont assez proches.

Je vais juste à peine plus vite que lui sur les chemins en cailloux, car il n’aime pas trop devoir rester concentré sur sa trajectoire. Lui, en revanche, me distance un peu lorsqu’on est sur la route et que ça monte légèrement. Mais je le rattrape quand on resdescend…

En fin d’étape, la fatigue s’est fait sentir : ma chaîne a sérieusement besoin d’huile depuis quelques jours déjà, et la sienne aussi. J’ai aussi une gaine endommagée sur le câble de mon dérailleur arrière, ce qui dérègle mes vitesses. Et rouler comme ça, ça fatigue un peu. Mais comme il n’y a quasiment rien le long de l’itinéraire, on ne peut guère effectuer des réparations, si simples soient-elles.

Demain, l’étape sera moins longue. Et c’est certain : nous arriverons à Lyon.

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