L’histoire commence par hasard. Je fais du vélo, avec un copain passionné de voitures anciennes. Nous sommes sur la véloroute et passons à Thoraise devant une friche industrielle qui abritait jusqu’en 2007 de nombreuses épaves, dont certaines assez bien conservées.
Au détour de la conversation, l’ami m’indique qu’un autre lieu de stockage d’épaves avait le même propriétaire. Mais ce qu’il ne sait pas, c’est qu’il vient de me révéler involontairement la localisation approximative d’un lieu que je n’ai jamais visité.Il pensait que je le connaissais, car il est bien connu des collectionneurs du secteur. En réalité, je connais son existence et j’en ai vu des photos, mais j’ignore sa localisation.
Les coins à épaves, c’est comme les coins à champignons. Ça ne se donne pas. Ça se trouve soi-même.
Mais pas pour les mêmes raisons.
Il s’agit surtout de les préserver (et de préserver la tranquillité des propriétaires) : tout d’abord, à cause des voleurs, qui n’hésitent pas à dépouiller les épaves pour en tirer profit, ensuite des vandales qui les massacrent sans raison (ce qui m’insupporte au plus haut point), et pour terminer des autorités qui, sous prétexte d’écologie, obligent souvent les propriétaires à vider leur terrain.
Le copain se rend compte qu’il m’en a trop dit, ou pas assez. Il me promet de m’y emmener.
Il tiendra parole plus tard, mais je ne suis pas très patient. Et je suis informaticien et géographe, ne l’oublions pas. J’ai vite fait de déterminer la localisation exacte du lieu, malgré le peu d’indices en ma possession.
Je m’y rends.
Je ne dirai ni où c’est, ni comment je m’y rends. Toujours est-il que j’approche avec mon Peugeot NS pliant, un vélo qui peut être emmené en train ou en voiture, et même faire de nombreux kilomètres par ses propres moyens car il est confortable et efficace.
Approcher à vélo permet d’être plus discret. En effet, quand on explore un lieu insolite, même si on sait qu’on n’a rien à se reprocher, les gens autour ne le savent pas forcément. Il vaut donc mieux être discret, pour sa propre tranquillité comme pour celle du voisinage.
Du lieu, je ne sais pas grand chose.
Il s’agit d’un hangar plein de voitures. Dans les années 80, plusieurs collectionneurs ou marchands d’automobiles anciennes ont effectué des tentatives d’achat, sans succès.
Le temps a passé. Les voitures ont subi les vols, le vandalisme, et les affres du temps car le hangar n’est pas fermé et la toiture a de grosses lacunes.
Le lieu ne comporte plus aucun accès carrossable, car les arbres ont poussé. Cela renforce ma curiosité.
Je gravis la petite route qui y mène, car c’est sur une colline.
Un coup d’œil à travers les champs… il me semble apercevoir une masse dans le bois.
Je m’engage dans la forêt.
Le bois est touffu. Je dois laisser mon vélo pour pouvoir avancer.
Bientôt, j’aperçois quelque chose.
C’est comme irréel. L’impression d’arriver dans un autre monde, et une autre époque.
Les épaves sont bien là.
J’ai trouvé le lieu tout seul, et cela a quelque chose de magique qu’on ne peut pas ressentir en s’y laissant conduire.
Le comité d’accueil se compose notamment d’une 403 7CV…
Quoique, je devrais plutôt écrire « se décompose » que « se compose »…
C’est bien connu : dans un moteur il y a un « arbre ». Là, il n’y a plus de moteur, mais il y a quand même un arbre.
Une Simca Marly.
Bon. Entrons.
Ci-dessus, au premier plan, une seconde 403.
Un coup d’œil vers l’arrière : la Marly.
Je ne sais pas exactement dans quel état sont arrivées les voitures. Il faudrait des témoignages de l’époque, que je n’ai pas.
D’après ce que j’ai entendu, dans les années 80 la plupart étaient encore en bon état et sauvables.
Ceci dit, on voit bien sur les photos que certains sont arrivées accidentées (notamment la 404 et sa voisine de derrière).
Les voitures sont tellement serrées qu’il est impossible d’avancer sans marcher dessus. Je le fais avec une certaine délicatesse, mais l’état des toits montre que tout ne monde n’a pas eu autant de scrupules…
Les voitures ont été pillées et vandalisées.
Le hangar n’a pas plus de vitres que les voitures.
Des tags ont fait leur apparition récemment (d’après d’autres photos que j’ai pu voir, qui ne les comportaient pas).
Les graffs sur les murs ne me gênent pas. Sur les voitures, c’est dommage.
Je prends des photos comme je peux. Je n’ai que mon téléphone, et la luminosité n’est pas très bonne aujourd’hui. En plus, le lieu ne permet pas de prendre beaucoup de recul.
J’essaie de photographier chaque voiture, ou presque.
Une première petite vue d’ensemble du hangar.
Arrivé au bout du hangar, je vois voir ce qu’il y a dans les deux « pièces », au fond. Rien à part des graffs.
Revenons sous le hangar. Il y a plus de Dauphines qu’à l’élection de Miss France.
Le toit mériterait quelques travaux, mais rien d’insurmontable.
Les DS sont encore plus dépouillées que les autres, et c’était déjà le cas à Thoraise à l’époque. Y aurait-il quelques acharnés de la DS dans le secteur ?
Une tuile qui ne tient plus guère que par un grand mystère…
Il y a un certain nombre de voitures peu courantes dans ce hangar, comme cette Alfa-Roméo…
Simca est une marque bien représentée…
Je ne vais pas tout énumérer, mais on trouve au moins les marques suivantes : Citroën (DS), Peugeot (403 et 404), Renault (Dauphine, Floride, 4L camionnette), Simca (Grand Large, Marly et autres), Alfa Roméo, Mini Cooper, Dodge, et même une DKW qui se demande ce qu’elle fait là. J’en oublie peut-être.
La troisième et dernière 403 du hangar, presque au centre, est dotée de flèches de direction. C’est donc un des premières modèles. Et elle semble tout à fait saine (mais très dépouillée et cabossée).
Me voici revenu du côté où je suis entré…
Je m’éloigne du hangar. J’ai aperçu quelque chose un peu plus loin…
Tiens. La portière manquante de la 403 7.
Plus bas, je tombe sur une petite maison.
Elle est vraiment petite : une seule pièce.
Une banquette de voiture y a été traînée par des artistes…
Ce plafond, probablement bourré d’amiante, ne me dit rien qui vaille. Pas plus que la trappe béante dans le sol, sous laquelle il y a de l’eau dont j’ignore la profondeur.
Un peu de ferraille, mais difficile de dire ce que c’était. Probablement pas une voiture.
Je ne suis pas au bout de mes surprises. Après le cimetière de voitures, c’est le cimetière des vieux bidons et des vieux postes de télévision…
Ça, ça mériterait d’être nettoyé.
Je reviens au hangar et en fais un dernier tour par l’extérieur…
Il est bientôt temps de retrouver celui qui m’attend : mon vélo.
Notes :
Je suis preneur de toute information sur l’histoire du lieu, si vous le connaissez. J’aimerais bien savoir pourquoi et comment ces voitures ont été mises là et laissées à l’abandon, tout comme à Thoraise. Je me demande si ce propriétaire possédait d’autres lieux. J’ai moi-même racheté l’année dernière deux 403 qui se trouvaient dans une grange dont les propriétaires m’ont indiqué qu’ils l’avaient achetée pleine de voitures, et je me demande si c’était le même propriétaire.
Dans deux numéros de La Vie de l’Auto, fin janvier ou début février 2017, sont parus des articles sur le chasse à l’épave, faisant la part belle à ce lieu (avec des photos datant, d’après l’article, de l’été précédant ma visite). Malheureusement, l’article ne nous apprend rien sur l’histoire du lieu.
Inutile de me contacter pour me demander « où c’est ». Je préserverai la tranquillité du lieu et de son propriétaire.
Bonjour,
belles photos, j’aimerais bien tomber szur cet endroit, ça doit être magique
ça me rappelle vers 1990 la première fois que j’ai découvert l’ancien garage à Thoraise ,j’escaladais pour amener ma tête au niveau des lucarnes: c’était magique, il y avait plein de modèles rares, comme si le temps s’était arrêté à la fin des années 70 !
Un jour, à l’été 1993, j’étais avec un copain et sa copine de l’époque, et on a vu un mec dans la propriété (apparemment une connaissance du proprio, genre un ancien mécano…), et la copine du pote a eu l’audace de lui demandé si on pouvait visiter les lieux et… il a accepté…! Incroyable… je me rappelle d’avoir touché quelques raretés, je me souviens il y avait une r12 gordini jaune, à l’époque personne n’en voulait mais aujourd’hui c’est une autre histoire
Il y avait aussi une frégate, des DS, au moins une triumph, une mustang je crois…. et plein d’autres modèles… de toutes sortes et la salle du fond enfermait plein de pièces de DS empilées !
Dehors quelques autos dont je crois une ami 8, j’avais même cru à l’époque que c’était une M35 à moteur rotatif, mais ma mémoire ne me confirme pas lol…
Mais déjà cette année là, le toit du garage commençait à s’effondrer provoquant quelques dommages à des voitures aujourd’hui très recherchées !
Par contre, cela fait très longtemps que je n’y suis plus retourné et à vous lire j’ai cru comprendre qu’il n’y a plus rien depuis 2007/2008, vous confirmez? si c’est le cas, dommage, j’aurais dû y retourner avant…
encore bravo pour les photos et je respecte votre choix de ne pas divulguer l’endroit même si je meurs d’envie de savoir où c’est !
Si je comprends bien cela ne doit pas être loin de Thoraise… peut-être un jour je trouverai !
cordialement
Stéphane
Ca me rappelle Bästnäs en Suède, ton affaire….
Mes photos (juillet 2016)
https://www.flickr.com/photos/23754142@N05/albums/72157672017704420
J’ai des photos de Thoraise si je ne te les ai pas déjà envoyées….
Merci pour vos deux commentaires fort sympathiques.